La gauche ou le conflit perpétuel

« Front », « lutte », « alliés », « combats »: quand la gauche parle de ses propres relations avec son altérité politique, les relations sont toujours caractérisées par le conflit. Cela, la gauche le reconnaît elle même à demi mot dans son propre vocabulaire guerrier et dans son moralisme outragé.

La gauche demande la « tolérance », alors qu’elle ne cesse d’inventer de nouveaux « combats’, c’est-a-dire de nouveaux casus belli pour attaquer encore et encore. Elle est un loup qui demande de la « tolérance » à un troupeau de moutons.

Ce processus ne se termine jamais. Comme le remarquait Ted Kaczynski, supposons que toutes les demandes issues de la gauche soient satisfaites par magie, en très peu de temps la gauche trouverait de nouveaux prétextes à outrage et de nouvelles choses, traditions, identités, idées, personnes… à attaquer.

La gauche est la matrice de toutes les guerres idéologiques de la modernité. Toutes. Les révolutions de droite ont été autant de tentatives de retenir, restaurer, retrouver, comme la gauche l’a reconnu elle même en les qualifiant de « réactions ».

Cela fait trois siècles que l’occident est traversé par une guerre métapolitique permanente. La noyade des peuples européens sous les pouvoirs immigrés, bobos, médiatiques… n’en est que la manifestation actuelle.

Si on veut la paix métapolitique, il n’y a qu’une seule solution : dépasser l’opposition droite-gauche, déconstruire la déconstruction, troquer cette modernité qui n’en finit plus de dégénérer contre le Principe transcendant – ou, si l’on préfère, l’éternel cosmos.

4 choses que les droitards doivent apprendre de la gauche

1) Quand on encourage les gens à s’épanouir, les conséquences sont positives.
Les gens qui ont du talent, de la créativité, ne le manifestent pas automatiquement. Pour faire passer son talent de la puissance à l’acte, il faut de l’entraînement, des oeuvres imparfaites, du temps, des essais et des erreurs. Ceux qu’on révère comme des génies ont de l’entraînement derrière eux, et avec lui, inévitablement, des erreurs.
Les créatifs en puissance ont besoin d’un bon milieu pour créer. Ils ont besoin de critiques positives, de suggestions, d’échanges. Ils n’ont surtout pas besoin de « langues de timp » (comme dit Rockin Squat) qui vont leur dire systématiquement « tu fais de la merde » sans rien proposer ou mettre en valeur. Les droitards ont trop souvent une attitude négative vis-à-vis de quiconque créée. Ils disent défendre la qualité, mais on les voit rarement dire « oui » ou « vive » quelque chose.
La gauche est beaucoup plus ouverte, ou du moins elle l’a été, vis-à-vis des créatifs en puissance. Comme elle a été ouverte vis-à-vis des intellectuels en puissance, alors qu’à droite on a trop souvent tendance à mépriser ça. Conséquence: ceux qui avaient du talent à revendre sont allés à gauche, puisqu’ils y trouvaient un milieu favorable à leur épanouissement, alors que la droite les décourageait systématiquement.

Droitards, évitez de cracher sur quiconque devient un peu « connu » dans vos milieux et sur quiconque réalise quelque chose. Encouragez-les plutôt. Si vous tenez absolument à critiquer, faites-le positivement, pointez ce qui vous plaît, proposez. Obligez-vous à être positifs.

2) Le libéralisme doit être subordonné à autre chose que lui-même, sinon il vous détruit et vous rend cocu.
Le libéralisme, c’est bien si cela permet de défendre les classes moyennes. Cela permet l’entreprenariat, la créativité, cela permet les PME et les échanges fructueux entre individus, régions…
Par contre, si le libéralisme n’est pas subordonné à autre chose que lui-même, il devient l’instrument des multinationales – de Monsanto à McDo – qui transforment les classes moyennes en prolétaires, qui font des OPA agressives, qui détruisent les cultures, qui nous oppriment à l’aide du lobbying, qui nous volent nos moyens de productions et en échange nous donnent du fast-food et de la télé-réalité.
Si le libéralisme n’est pas limité, il fait le jeu des ultra-riches, des banquiers, de ceux prêts à tous nous ruiner. Ce libéralisme-là est celui qui a transformé nos ancêtres paysans en prolétaires, celui qui spécule, celui qui détruit les liens organiques pour nous transformer en consommateurs gras et laids.
À gauche, on a tendance à trop en appeler à l’État, à vouloir mettre les gens dans les carcans de la bureaucratie et du fonctionnariat. La gauche souffre parfois d’un antilibéralisme primaire. Mais, d’un autre côté, à gauche on a très bien compris à quel point les Monsanto de notre monde sont des monstres nocifs qui polluent tant l’homme que la nature.
Les « hommes blancs » qui vivent comme managers de Monsanto et Wall Street ne nous représentent pas, ils ne sont pas des nôtres.

Droitards, ne vous laissez pas cocufier par les Bolloré, Sarkozy, ni par le miroir aux alouettes du libéralisme comme tel. Au mieux on défend un libéralisme modéré, favorable aux classes moyennes, et subordonné à un bien commun au-delà de l’argent. Si vous défendez le droit des ultra-riches à nous enc…r et à financer des lobbies, vous êtes cocus, point barre. De ce côté, la gauche a su être (un peu) plus curieuse et (un peu) moins dogmatique.

3) Le collectivisme, quand on en a un peu, c’est bien.
L’individualisme à haute dose produit l’atomisation, la solitude, l’incapacité à peser sur le monde. Le collectivisme permet de former quelque chose, de peser sur le monde, de s’inscrire en rapport de force, alors que l’individualisme seul nous rend isolés.
Le dernier des gauchistes, le pire fumeur de joints, sait aller à quelques manifs chaque année, faire des petits dons ici et là, se pointer à la fête de l’Huma. Il fait vivre ses causes, il est collectiviste ou tribaliste dans les actes, alors que beaucoup à droite tiennent de plutôt bons discours mais ne font absolument rien.
Pareil, le dernier des gauchistes sait participer à un lynchage SJW, ces lynchages qui font si peur aux gens de droite, alors que la droite n’a jamais réussi à faire virer ou à sérieusement mettre la pression sur un seul gauchiste. Seules exceptions, le GamerGate (qui reste un « contre » plutôt qu’un « pour ») et à la limite E&R.

Droitards, mettez parfois le moi-je, le CV, l’individualisme dans votre poche, parlez moins, acceptez d’agir plus même si c’est par ou pour les projets d’autres personnes.

4) Comme dit Roman Bernard, la droite dit toujours non, très peu oui. Il faut avoir des projets, des objectifs formulés positivement.
La gauche est souvent destructive, mais elle sait formuler ses objectifs positivement, elle sait se donner des fins, et se donne les moyens de les obtenir. Pendant ce temps, à droite, on partage un vague dégoût de ce que le monde devient, de ce qu’on nous fait subir, mais on n’a aucune alternative à proposer et aucun projet.
Il faut des projets personnels et collectifs. Un peu de vertus. Un peu de critiques positives. C’est comme ça qu’on créée, qu’on s’encourage les uns les autres, qu’on fait tissu social, qu’on finit par former de vrais réseaux et peser sur le monde au lieu de le subir.
Il y a continuité entre le développement personnel et le fait de monter des projets de type associatif par exemple. (La gauche s’est illustrée dans l’associatif, comme dans les médias: droitards, où êtes-vous dans ces domaines?)

Droitards, en continuité du point 1, obligez-vous à proposer du positif ou à contribuer aux projets positifs de vos camarades.

Si vous tenez à critiquer négativement et à manifester du dégoût, faites-le sur nos ennemis et uniquement sur eux.

N’ayez surtout pas cette attitude de négativisme constant à l’égard de vos propres camarades, surtout ceux qui tentent de représenter en existant par des projets publics. Le négativisme de la droite à son propre égard est une véritable tératologie, de quoi dégoûter de toute activité.

En un mot, là où la gauche a su cultiver la curiosité, les encouragements, les échanges entre soi, la solidarité… faites-le aussi.

Tout en ayant notre propre connaissance et nos propres buts.

Médiocrisme, cassossisme, avant-gardisme

Deux maux maintiennent les droitards à un bas niveau: le médiocrisme et le cassossisme.
(En fait, il y en a plus, mais ces deux-là sont ceux qui m’ont le plus frappé.)

Par « médiocrisme », j’entends une attitude qui non seulement favorise, mais surtout valorise la médiocrité. Être médiocriste, c’est revendiquer par ses actes et ses habitudes le droit d’être médiocre. C’est confondre un mouvement politique avec un substitut de maison, c’est vouloir rester entre soi, sans projets, sans actions, à perpétuellement tailler le bout de gras comme au café pendant que le monde nous abandonne. Le médiocriste, c’est celui qui est conscient que la dégénérescence de l’Europe date de bien avant l’immigration et les années 60, mais se dit: « si on était restés entre nous on aurait pu dégénérer tranquillement entre Blancs! »
Le médiocriste adore le circlejerk – répéter dans son propre groupe des opinions qui font déjà l’unanimité. Il aime les jeux de mots, les petites blagues. Il aime aussi les ragots. Le médiocriste aime tout personnaliser, tout réduire au niveau des individualités, comme s’il n’existait pas de niveaux supérieurs et plus impotants. Le médiocriste aime les dichotomies simplistes: par exemple, si vous n’êtes pas « anti-bougnoule », vous êtes forcément « islamophile », et pour lui le summum de la subtilité consiste à croiser les bras et à répéter « ni keffieh ni kippa ».
Le médiocriste n’a aucun courage, ne contredit jamais ses ennemis, ne prend jamais position hors de son petit milieu social: quand il n’est pas en train de commenter l’actualité – actualité à laquelle il ne participe jamais – ou de communier dans la blague minable et le lieu commun, le médiocriste casse du sucre sur ses propres camarades. Il peut passer des heures à échanger des ragots et des commentaires de p… sur telle ou telle personne de son milieu. Tandis qu’un gauchiste, aussi débile soit-il, n’a aucun problème à attaquer verbalement quiconque n’est pas de son camp, le médiocriste de droite, lui, attaque exclusivement ceux qui sont dans son camp. Il parle beaucoup de ses ennemis, mais ne fait face qu’à ceux qui devraient être ses amis.
Le médiocriste n’est pas forcément un médiocre de nature. Souvent, sa médiocrité est relative et contingente: le médiocriste peut avoir de bonnes capacités. Seulement, il s’en sert très peu, et si vous le poussez à s’en servir il le prendra très mal. Le médiocriste tient à sa médiocrité, s’identifie à elle. Il la considère comme un droit acquis et ne veut surtout pas en sortir.
Si vous lui suggérez un projet, un petit changement dans son attitude, une contribution à quelque chose de tangible, ou même si vous tentez de créer une réflexion qui dépasse le lieu commun, le médiocriste y verra une insulte personnelle à son égard. Il sera alors prêt à des efforts immenses pour vous attaquer, vous faire ostraciser. La droite est remplie de complots de coulisses, dus à cette attitude de médiocristes blessés, se liguant contre quiconque semble vouloir perturber le cours de leur vie minable, fût-ce pour le meilleur…
Le médiocriste est un individualiste forcené. Il revendique son droit de critiquer, son droit à être négatif tout le temps – comme une connasse revendique son droit d’aguicher, d’exploiter les hommes, de baiser à droite et à gauche, de mettre tous ses maux personnels sur le dos de « la patriarchie » et d’avoir toute l’attention des médias pendant que les mecs se débrouillent comme ils peuvent.
Le médiocriste ne s’associe vraiment aux autres que pour attaquer des cibles de son milieu; le reste du temps, il est un petit-bourgeois dont les projets positifs sont exclusivement personnels, et, bien souvent, matériels.

Le second mal, que j’ai appelé « cassossisme », est plus frappant – et peut-être à certains égards plus honnête – que le médiocrisme.
Généralement, le droitard médiocriste est plutôt bien inséré dans le monde professionnel, ou il veut l’être. S’il est étudiant, il ne veut pas faire de vagues, parce que les discussions hautes en couleur ne lui correspondent pas, parce qu’au fond il voudrait juste être « normal » et qu’on laisse son monde en paix. Il est hypocrite par nécessité: parce qu’il veut à la fois survivre dans le système et dans le monde mainstream, d’une part, et rester « de droite » d’autre part. Le médiocriste laisse la place aux gauchistes, leur laisse toute l’expression mainstream, parce qu’il tient à garder sa petite place et ses petites libertés discrètes (et médiocres).
Le cassossiste, lui, n’a pas ces prévenances.
Alors que le médiocriste se raccroche à sa petite carrière ou à ses petits projets personnels – dans un monde qui pourtant chavire -, le cassossiste, lui, a pris la mesure du chaos dans lequel nous sommes plongés.
À la base, il est quelqu’un qui sent instinctivement l’urgence de la situation. Il sent le déclin terrible de l’Occident, son délitement de plus en plus rapide. Il sent un monde qui devait durer toujours, qu’on lui a vendu comme « progrès », qui en fait l’a affaibli et s’effondre autour de lui. Qu’il ait ou non une « situation », il n’est pas individualiste: il voit les tendances destructives à l’oeuvre, les peuples et les cultures de l’Europe en pleine dissolution, la lâcheté de ses frères et la pourriture de ses soeurs, et tout ça, il ne veut surtout pas l’accepter. D’autant qu’il sait que tout cela ne peut aller qu’en empirant.
Le problème, c’est qu’il n’a aucun pouvoir là-dessus. Des intuitions globales mais aucun pouvoir sur la marche du monde. Il voit l’hostilité, le vice, mais il ne veut pas s’y soumettre. Il veut lever le poing de Rosa Parks ou de Jesse Owens; il sait qu’au milieu des « minorités » choyées et privilégiées c’est lui la victime, lui l’inconnu, lui l’enfant abandonné, lui qui devrait continuer la chaîne plurimillénaire de l’Europe et qu’on a choisi de dégrader au rang de « mâle blanc » qui n’existe que pour être accusé.
Sauf que, contrairement à Rosa Parks et à toutes les icônes fabriquées par la gauche, il n’a personne pour conter son histoire; personne qui veuille bien transmuer son malheur en noblesse, personne pour sublimer son mal-être en programme politique ou culturel. Contrairement à Rosa Parks il n’a aucun réseau derrière lui, aucun financement, aucune famille politique réelle. Il est vraiment du peuple et c’est pour cela qu’il n’est qu’un atome. Car, comme le relevait À Moy que Chault, « il n’y a plus de peuple ».
Alors, peu à peu, ce droitard non-individualiste adopte le comportement du cas social.
Il s’habitue à la détestation perpétuelle de ceux qui l’ont mis hors de la norme, de ceux qui lui ont volé sa dignité, de ceux qui détruisent son héritage et ont pris sa place.
Tout cela devient vite un habitus à part entière.
Et, de révolté, il devient un cassossiste.
Privé de toute définition positive de lui-même, privé de tout espoir et de toute reconnaissance, il compense en postant à longueur de temps sur ceux qu’il déteste. Il s’enferme dans ce que les gauchistes appellent un « discours de haine » – où à vrai dire eux l’ont enfermé, car ce sont qui ont systématiquement « déconstruit » toute son identité, qui promeuvent des « minorités » à sa place, et qui occupent le monde associatif, académique… Son désir de sociabilité devient communion dans la médiocrité, avec les autres droitards, ou dans la détestation. Individualiste, il le devient faute de mieux. Bien souvent il est relégué au statut de cas social par la force des choses: homme normal dans un monde anormal, il se retrouve pigeonné, exploité, mis de côté, agressé; il est enfermé dans un milieu « cassossique » et il ne voit en face que le mépris des bobos, ainsi que celui des droitards médiocristes et des connasses qui, eux, ont leur petite carrière à manager, parce qu’ils sont en train d’arriver, eux. (Ou du moins s’efforcent-ils d’en donner l’impression.)
Alors, réduit au statut de cas social, celui qui aurait été quelqu’un d’accompli en d’autres circonstances devient un « cassossiste ». Il n’a pour lui qu’un nihilisme vengeur. Après tout, si on n’a plus d’espoir et qu’on n’est plus grand-chose, si la « culture » n’est que classiques morts (et difficiles d’accès) ou soupe pop libérale-libertaire, qu’y a-t-il encore pour lui?
White trash, le cassossiste l’est par privation, par excès de souffrance vécue, parce qu’il a été abandonné par le « progrès ». Il est rarement « cassos » de nature, contrairement au Tschandala par exemple.
Enfermé dans la conscience diffuse de sa privation, le cassossiste s’auto-condamne en ne voyant plus que du négatif. Il n’a pas plus de projets ou d’actions que le médiocriste. Au mieux, quelques éruptions collectives ici et là, de l’entre-confirmation entre cassossistes – pauvre substitut de la saine reconnaissance sociale.
Paradoxalement, le cassossiste peut être plus prometteur que le médiocriste. Il a de mauvaises habitudes, des manques flagrants, mais il a beaucoup moins à perdre. Par conséquent, il peut être plus ouvert sur l’action et sur les projets positifs. (Ce que la gauche reconnaît quand elle tente de réduire les gens de 4chan, qui sont « actifs » à leur façon, au statut de célibataires cassos: la gauche reconnaît que ces gens sont des « losers » – mais eux n’ont pas droit à l’égalité, eux sont sacrifiés à la croissance économique et au pseudo-progrès minoritiste.)
Le cassossiste doit quitter la négativité, et pour cela, il doit apprendre ou réapprendre à penser positivement, à se détacher d’un monde devenu laid et aliénant, sans pour autant sombrer dans l’individualisme ricaneur des médiocristes.
À certains égards, le cassossiste ressemble beaucoup au rebeu racailleux: le rebeu fume du shit en bas de sa tour et agresse des gens pour oublier sa misère existentielle, le cassossiste fait la même chose avec les jeux vidéos et les « discours de haine »; et tout comme le rebeu fumeur de shit trouve parfois dans l’Islam des espoirs et des repères qu’il n’avait jamais eu, certains cassossistes deviennent des catholiques traditionnalistes.

Identifier des problèmes, c’est bien. Il faut savoir à quoi on a affaire pour y faire face. Si on ne sait pas, on frappe dans le vide et on s’épuise tout seul.
Mais connaître des problèmes ne suffit pas. Si on connaît, mais qu’on n’a aucune idée de solution, on reste dans la critique perpétuelle et on n’est pas loin du déconstructionnisme. Certes, le déconstructionnisme de gauche est autosatisfait, narcissique, alors que celui de droite porte le ricanement tragique d’un ange tombé du ciel, mais dans les deux cas, critique n’est pas solution: la critique n’est qu’une partie du chemin, et la première tentative de solution vient immédiatement après. Hors des projets de solution, point de salut.

Une première réponse se trouve dans le développement personnel et dans une attitude qu’on pourrait appeler « entrepreneuriste ».
De prime abord, le développement personnel est une réponse sur mesure à toutes les insatisfactions de la vie. Les gourous du développement personnel adorent parler de gens qui sont partis très bas et arrivés très haut. Tel « coach en séduction » explique à qui veut l’entendre qu’il a été puceau jusqu’à ses vingt-trois ans, qu’ensuite il est devenu une véritable machine de guerre, a abordé des filles tous les jours, et qu’à vingt-six ans il a dépassé les cent conquêtes. Tel coach en musculation montre en photo le corps de lâche de son adolescence, puis une photo de lui deux ou trois ans plus tard, musclé, beau, taillé. Bien sûr, ces coach n’hésitent pas à ajouter que tous les aspects de leur vie se sont améliorés en même temps, que tel qui s’est musclé a trouvé l’amour, que tel qui était dans la dèche gère sa PME depuis un an, etc. Réussite, réussite, réussite! Faites ceci, faites cela, et votre vie changera!
Pour beaucoup, le développement personnel est réellement une étape obligatoire.
On ne peut plus survivre en étant simplement médiocre, comme nos parents l’étaient: on doit naviguer dans un monde beaucoup plus dur et instable que le leur, dans un monde où la concurrence et la méfiance sont partout. De même, on a eu le cerveau lavé par les films de Hollywoood où le chevalier blanc gagne toujours et emballe la jolie fille à la fin, pour découvrir que dans la vraie vie le mec gentil est celui qui se fait exploiter et reste puceau. On a grandi sans pères, on s’est réfugiés dans les jeux vidéos, on a plus ou moins suivi les modes pour compenser un manque intrinsèque à l' »Occident » (post?)moderne. Le monde qui devait être celui du « progrès » a fait de nous des faibles destinés au sacrifice. On s’est habitués à consommer, à suivre, on a développé des comportements qu’on n’aurait jamais dû avoir, comme il nous manque des comportements et des repères que nous aurions toujours dû avoir.
Alors, par le développement personnel, on redécouvre l’autonomie. On redécouvre la virilité. On se prend en main. On retrouve notre propre valeur. On pousse les limites, parfois on tombe, mais on se relève toujours, et peu à peu on devient plus fort.
Le développement personnel, c’est notre punkisme à nous. Dans un monde où on ne cesse de vouloir nous réduire, revendiquer sa dignité et sa valeur absolue par des actes prend un aspect révolutionnaire.
Et, honnêtement, quand on est de la génération jeux vidéo, corps de lâche et ni père ni repère, on en a bien besoin!

Pour autant, on se rend compte tôt ou tard que le développement personnel a ses limites.
D’abord, il est terriblement individualiste. Par définition, quand on fait du développement personnel, on est centré sur soi. Or, si on ne pense qu’à soi, ou si on ne pense à autrui qu’à travers le prisme de son propre développement, qu’est-ce qui se passe? On peut effectivement acquérir des compétences, de l’expérience… mais on ne fait pas de politique. Au mieux on devient entrepreneur, mais on ne va pas mener de combat pour une grande cause. Ou alors on le fait de façon hypocrite, en utilisant la cause comme un moyen de faire carrière, d’être vu, apprécié, etc. C’est tout à fait courant à droite et on sait ce que ça donne: des « jeunes loups de droite » dont la seule conviction est la réussite personnelle.
Ce n’est pas pour rien que le développement personnel a vu le jour aux Etats-Unis, terre de protestantisme.
Ce n’est pas pour rien non plus que certains gourous du développement personnel sont fascinés par la pensée stoïcienne: celle-ci déconnecte radicalement l’individu du monde, elle restreint son domaine à la maîtrise de soi, permet tout à l’intérieur mais accepte de laisser l’extérieur à « la fortune » ou à quiconque a pris le pouvoir. Le stoïcisme permet un développement personnel plus intègre, dans un certain sens, que l’attitude « je vends des coaching en séduction » ou « je suis cool, regardez-moi » où l’apparence prime; le stoïcien authentique accepte tout avec sérénité. Mais, d’un autre côté, le stoïcisme mutile l’individu en le réduisant au domaine intérieur; son autonomie est réduite à son psychisme; à l’extérieur, il n’existe pas, ou admet que tout ce qu’il fait est contingent et sans importance.
Ensuite, le développement personnel va trop souvent de pair avec une hyperresponsabilisation de l’individu. Ce n’est pas toujours le cas, mais assez souvent, j’ai lu ou entendu des types qui y évoluent dire « vous êtes responsable de tous les aspects de votre vie, acceptez-le, c’est comme ça que vous vous améliorerez intégralement ». Il y a là un piège majeur. En face, les « minorités », ces groupes qui ne produisent rien mais ne cessent de tout nous prendre, passent leur temps à dire que tous les problèmes du monde sont de notre faute, que le « mâle blanc » – cet inventeur de génie qui s’est épuisé dans le matérialisme – est responsable de tous les maux, qu’au fond si nous n’existions pas tout irait mieux. Ce discours est exactement complémentaire avec le « je suis responsable de tous les aspects de ma vie ». D’un côté on a des maîtres arrogants, à savoir ces « minorités » qui sont reconnues et ordonnent, de l’autre on a des « petits Blancs » qui se résignent à un statut d’esclave déshérité, juste bons à s’épuiser dans le tertiaire, pour payer toutes les taxes, pour se faire cracher dessus et mettre en minorité (réelle celle-là) encore et encore jusqu’à la mort.
Nous sommes responsables de décider de sortir de la misère, nous sommes responsables de nos propres décisions de façon relative (relative à notre maturité, discernement, à nos croyances, à notre vécu…), mais pour le reste, peanuts. En quoi ce monde pourri relèverait-il de nos responsabilités? À la limite, je préfère encore l’esprit du Joker dans Batman – rien à perdre, rien à foutre.
Enfin, le développement personnel poussant vers la sociabilité et les résultats tangibles, il conduit à accepter au moins temporairement les normes et les modes du monde. Si on les accepte suffisamment, si on arrive à « faire son trou » malgré ces normes dont nous ne décidons jamais, on peut « réussir ». Emploi, carrière, « amis » – entre guillemets, car que sont des « amis » qui vous mettraient au ban de toute sociabilité s’ils connaissaient vos pensées? -, copine, célébrité même, on peut obtenir beaucoup avec le développement personnel. Plus d’un est passé du statut de « puceau nolife corps de lâche » à « type bien dans sa peau avec des amis et de l’expérience sexuelle ». Des réussites! Une rupture avec le statut de cassos, de médiocre! Mais si on s’identifie à ces « réussites », on craint de les perdre, car si on les perd on retombe au statut de cassos. Ce que l’on veut à tout prix éviter.
Du coup, on voit des types du développement personnel qui se transforment en petits bobos, ou en conservateurs évitant soigneusement de parler de politique. Ils veulent exister, individuellement, et ils ont accepté les compromis pour leur petite situation, leur carrière, leurs « amis ». Ils ont retrouvé leur propre valeur, mais ils l’ont oubliée en chemin, pour ne garder que les apparences de la valeur et de la réussite; ils répriment leur conscience en échange d’une situation, de reconnaissance, d’argent, d’accès à des milieux riches en belles filles, en argent…

Mal compris, le développement personnel conduit au reniement, à la résignation, sous l’apparence de la bonne sociabilité.
Bien compris, il peut conduire à une certaine duplicité, nécessaire dans notre monde de répression SJWesque et de concurrence exacerbée, mais qui n’étouffe pas la conscience et l’authenticité. Mieux encore: on peut utiliser le développement personnel et l’entrepreneuriat pour se rendre indépendant, pour avoir des amis honnêtes, pour s’auto-financer. Un choix difficile en-deçà duquel on trouve toutes sortes de modalités intermédiaires.

La seconde réponse, qui à mon avis fait suite au développement personnel et le prolonge, c’est l’activisme trans-courant, qu’on peut aussi appeler avant-gardisme.

On part de la droite, on a conscience des réalités d’aujourd’hui et de combien celles qui dominent incarnent le Mal, mais en même temps on accepte de voir ce que la gauche a fait de mieux, pourquoi la gauche a réussi et exerce un réel pouvoir alors que la droite n’est qu’une servante falotte, et on veut dépasser cet inutile clivage droite/gauche.
Ce en quoi, d’ailleurs, on a quelque chose en commun avec ces grands mondialistes que sont les Attali, les banquiers, les onusiens, les ONGiens… Eux ont pris à la droite son affairisme, son amour de l’argent, et à la gauche sa mythologie progressiste, son fanatisme de « l’émancipation » ainsi que son aspect intrinsèquement destructif. Eux jouent à parler à droite et à gauche, mais ils sont au-delà du clivage. Nous, nous ne parlons nulle part, nous existons bien peu en dépit de notre nombre, mais il nous est aussi possible de dépasser le clivage.
Plus de conservatisme stérile. De la créativité, de l’organicisme. De la critique du capitalisme, des multinationales et des banques. Déconstruire le postmodernisme anti-Blanc avec ses propres armes. Des alliances, des projets, un respect sincère pour toutes sortes d’identités traditionnelles extra-européennes qui sont elles aussi dissoutes dans la mondialisation néolibérale-libertaire.
La position est difficile, car le trans-courant se prend des coups des deux côtés – on est fasciste pour les gauchistes et gauchiste pour les droitards – mais il est peut-être le seul qui fasse vraiment avancer les choses.